Face à la situation de plus en plus inquiète et précaire des postes médicaux de garde, je viens d’interpeller par écrit la Ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, Maggie De Block.
Les postes médicaux de garde sont à la base de l’accès à la médecine pour la population. J’irais même plus loin en disant que ces PMG constituent une part de l’avenir de la profession de médecin généraliste. Les PMG sont, quoi qu’il en soit, j’en ai la certitude, une des solutions à pérenniser pour les gardes de soirée et de nuit, de weekend et des jours fériés.
Plus globalement, l’existence des postes de garde s’inscrit dans le cadre de la revalorisation de la médecine générale de première ligne, d’une meilleure gestion et utilisation des urgences hospitalières par la population et de la sécurisation des gardes pour les médecins prestataires.
Dans le contexte que nous connaissons de pénurie de médecins généralistes, combiné à un vieillissement des praticiens en place et à une rude sélection à l’entrée (numerus clausus, examens d’entrée, etc.), la profession de généraliste est largement dévalorisée et n’attire pas les jeunes médecins. Nous devons nous attendre dans les années à venir à une pénurie structurelle et problématique, surtout pour les territoires ruraux comme ceux de la Hesbaye d’où je viens.
C’est là que les PMG ont un rôle important à jouer dans la mesure où ils peuvent capter de jeunes médecins dans des zones rurales en pénurie. Le principe même de poste médical de garde permet la fusion de plusieurs zones comme c’est le cas avec le PMG du Cercle Médical des omnipraticiens de Hesbaye (CeMOH). Un autre PMG, l’AMEH (Aide Médicale en Hesbaye) est reconnu depuis plusieurs années et subventionné mais la structure regroupant les deux cercles fusionnés de l’AMEH et de l’AMGH (pour Hannut et Lincent) sous le nom de CeMOH, n’a toujours pas été reconnue. Avec le CeMOH, ce sont les communes de Wanze, de Villers-le-Bouillet, de Verlaine, de Héron, de Burdinne, de Braives ainsi que Hannut et Lincent qui sont couvertes.
Cela permet ainsi de diminuer significativement le nombre de gardes par médecin. Dans ces communes rurales, l’accessibilité à l’hôpital n’est pas chose aisée et le PMG est donc une réelle alternative de choix et de qualité.
Les responsables du CeMOH reçoivent les subsides de l’AMEH pour un territoire beaucoup plus grand et une population également nettement majorée (avec la fusion des territoires, la population concernée est passée de 38 000 à 57 000 habitants et la surface à couvrir a augmenté de plus de 50%). Ils avaient demandé une augmentation de 14 000 euros (soit un subside total de 130 000 au lieu des 116 000 octroyés à l’AMEH) mais n’ont reçu qu’une promesse de versement que 122 00 euros. Bien que les responsables de ce PMG aient sollicité des explications concernant ce montant il y a plusieurs semaines, leur demande est restée lettre morte. De plus, le subside était attendu pour le mois d’avril et à ce jour, alors que le mois de juin vient de commencer, ce PMG n’a encore rien reçu !
Enfin, pour l’année 2015, le subside versé n’a été que de 97 000 euros au lieu des 116 000 euros prévus. Malgré les demandes d’explications, aucune réponse n’a été fournie que ce soit par l’INAMI ou par votre Cabinet.
D’un point de vue économique, les PMG rendent accessibles les soins pour les populations les plus précarisées en pratiquant bien souvent directement le tiers-payant.
De nombreux patients dans le besoin vont aux urgences car la facturation y est différée mais cela ne fait que reporter le problème à plus loin. Or, nos services des urgences sont submergés par des patients qui pourraient être pris en charge adéquatement par des médecins généralistes dans des PMG bien équipés. Lors d’un passage aux urgences, il n’est pas rare que certains examens coûteux pour l’INAMI soient systématisés (bilan sanguin, ECG, imagerie médicale, etc.) d’une façon parfois injustifiée.
Les postes de gardes améliorent aussi l’efficience des gardes avec la possibilité de faire des consultations, limitant ainsi les visites à domicile aux situations où le patient ne peut absolument pas se déplacer (par exemple aux personnes âgées en maison de repos, aux soins palliatifs, etc.). Le médecin gagne ainsi du temps en évitant les déplacements au domicile et le patient paye moins cher.
Un poste de garde permet aussi d’avoir plus de matériel sur place comme un ECG, du matériel de suture, de quoi faire des prises de sang et d’autres prélèvements ce qui améliore considérablement la prise en charge globale du patient. Cette globalité passe bien entendu par d’importantes synergies entre les PMG et les laboratoires d’analyses, les hôpitaux de la région, les MR et les MRS.
En principe, les médecins qui travaillent dans les PMG devraient le faire dans un lieu sécurisé avec un chauffeur pour la nuit et avec une garde doublée la journée ce qui est non négligeable dans un contexte de féminisation de la profession. Faute de budget adéquat, le PMG du CeMOH ne dispose pas ces aménagements bien utiles et ne peut même pas ouvrir la semaine…
Le véhicule avec chauffeur leur a toujours été refusé. Il représente, bien sûr, une garantie de sécurité pour les visites nocturnes des médecins mais permet surtout d’assurer le rôle de taxi social, pour les personnes qui ne disposent pas de moyens de locomotion et imposent une visite au domicile, ce qui alourdit la charge de travail des deux médecins présents au PMG, en mobilisant un des deux sur la route, pour des périodes de minimum une heure par appel.
Les demandes répétées d’avance de budget des responsables de ce PMG ayant toujours été refusées, l’aide administrative ne suit pas et c’est le patient qui en ressent les effets directs. Ce PMG pourtant crucial ne reçoit pas ses crédits à temps et souffre ainsi de graves problèmes de trésorerie. Le tout semble bloqué pour une question de non-reconnaissance de ce PMG par l’INAMI car les conventions ne sont pas signées.
Cette mesure est donc incompréhensible, elle me semble aller à l’encontre de l’amélioration de la qualité des services médicaux pour cette population.
Toutes les études montrent qu’une médecine de première ligne, accessible et de qualité permet d’améliorer le système de santé de façon globale et de diminuer les coûts pour la collectivité.
Ce blocage des postes de garde est contre-productif. Il va drainer plus de patients vers les urgences qui sont déjà surchargées de travail pour des problèmes qui relèvent de la médecine générale et qui au final vont coûter plus cher à la sécurité sociale car plus d’examens inutiles seront prescrits.
Face à des postes médicaux de garde sous pression, sous-financés et mal reconnus comme celui du CeMOH j’ai donc posé diverses questions.
- Afin de démentir les soupçons d’un financement inégal en fonction de l’origine linguistique des PMG, j’ai demandé à la Ministre de me fournir:
– les crédits budgétaires pour 2016 et 2017 (PMG par PMG) ;
– le taux de liquidation de ceux-ci sur la base des budgets initiaux 2016, 2017 et 2018 ainsi que sur la base des différents ajustements budgétaires ?
- J’ai aussi demandé à Maggie De Block de m’indiquer les démarches qu’elle entreprendrait pour accélérer le traitement des dossiers de reconnaissance des différents PMG par l’INAMI ?
- Et enfin je lui ai demandé de m’expliquer pourquoi le contenu des conventions qui lient l’INAMI aux postes médicaux de garde souffrent d’un tel retard alors que ledit contenu est imposé et non négociable ?
En tant que Sénateur et en tant que socialiste, je suis au service de la population et je ne peux que faire le constat que la situation actuelle touche directement à la qualité de vie de centaines de patients. Mon interpellation vise donc à apporter des solutions concrètes pour ces patients, pour la population, pour nous tous ! Car la défense des soins de santé et de la justice sociale sont depuis la première heure parmi les combats du PS !